Mecanisation Forestiere - Felix, le tracteuer forestier «très spécial » de Pfanzelt

Présenté pour la première fois en 1991, le « Tracteur forestier spécial Felix », comme l’a nommé son constructeur Pfanzelt, intrigue par ses caractéristiques particulières. Sa cabine positionnée très en avant, son double système de direction et son empattement variable en font une machine de débardage unique en son genre. Dans les Vosges, Fabrice Vaxelaire a fait le choix du Felix en 4 roues pour débarder du bois-énergie, mais aussi des bois longs comme des billons.

Un développement autour du bois-énergie

Sans conteste, la physionomie spécifique du Felix doit beaucoup à son « nez court ». C’est en tout cas ce qui saute aux yeux quand on le découvre à nouveau. De manière plus générale, la machine frappe par sa compacité et c’est d’ailleurs un des premiers critères que s’était fixé Fabrice lorsqu’il s’est agi de renouveler son tracteur Wf Trac 2040. Aujourd’hui dirigeant de l’entreprise Fbv Énergie Bois, Fabrice Vaxelaire a rejoint son père, Bernard, en 2002. Ce dernier s’était installé à Gerbamont comme débardeur indépendant en 1986, après un début de carrière en tant que bûcheron. Une orientation, selon son fils, guidée par sa passion pour la mécanique et les matériels. Fabrice se souvient que son père a démarré, comme beaucoup, avec un Mb Trac, un modèle 800 de 1977 acheté à l’époque chez Hantsch qui représentait alors la marque. Une machine un peu emblématique pour la famille vosgienne qui l’a d’ailleurs conservée. « Il tourne encore de temps en temps », tient à souligner Fabrice, une pointe de nostalgie dans le regard. Un modèle 1000 finira par lui succéder comme tracteur principal avant que l’entreprise ne passe, finalement assez logiquement, sur des tracteurs Werner, un Wf 1100 avec grue et poste inversé, puis le Wf Trac 2040. Une longue fidélité aux bases Mercedes qui finalement prit fin principalement en raison des difficultés rencontrées par Werner. Le Wf 2040 était une bonne machine, estime Fabrice, à condition de pouvoir s’approvisionner facilement en pièces pour parer à de « petits, mais fréquents soucis ».
Toujours est-il que, ressentant jeune la même vocation que son père, Fabrice s’en est parti afin de se former au lycée de Crogny où il a décroché un Bts de Gestion Forestière. En 2002, à son retour dans les Vosges, il se fait salarier dans l’entreprise familiale dans l’idée de monter un projet de production de plaquettes forestières. Un premier broyeur, un Europe Forestry, est acheté en 2003 pour démarrer la production et, en 2006, les deux hommes créent la Sarl Fbv Énergie Bois. « Les débuts ont été difficiles, se remémore Fabrice, on n’avait pas le volume suffisant pour atteindre notre seuil de rentabilité de 4.000 t. » Heureusement, le fond de clientèle de Bernard Vaxelaire a permis de compléter l’activité par des chantiers de prestations. La mise en route d’une première chaudière à La Bresse en 2001 fut aussi pour eux une opportunité mais il a fallu prospecter et surveiller les projets de nouvelles installations. « On voulait être les premiers sur le secteur », explique Fabrice. Des premiers contrats ont suivi, avec des acteurs importants comme Cofely ou encore Dalkia, et l’entreprise a pu embaucher son premier salarié. Puis, les volumes ont continué à augmenter progressivement avec, notamment, la mise en route de projets de l’Ademe qui ont permis à l’entreprise d’atteindre son point d’équilibre et de continuer à se consolider progressivement. Aujourd’hui Fabrice emploie quatre salariés en forêt, un bûcheron, un débardeur, un pilote sur pelle et porteur qui bûcheronne aussi occasionnellement et un dernier employé qui mène le broyeur et effectue des livraisons. Un mi-temps administratif complète l’équipe de Fbv Énergie Bois. La Sarl commercialise annuellement 10.000 t  de plaquettes sèches, tout en continuant à proposer des prestations d’abattage-débardage. Une déchiqueteuse Greentech 952 Mega acquise en 2014 est venue apporter un surcroît qualitatif aux plaquettes, que Fabrice crible également depuis trois ans. Ainsi, il préfère privilégier une montée en gamme plutôt qu’un développement basé uniquement sur les volumes. Depuis peu, le jeune entrepreneur développe également une offre de bûches densifiées qu’il fabrique avec les fines sorties du crible, par échauffement et compression. Un produit qui dispose d’un bon rendement calorifique tout en présentant l’avantage d’être toujours sec et d’occuper moins d’espace de stockage. 20 t de bûches densifiées devraient être produites par Fbv cette année, un volume amené à croître à condition d’en renforcer la distribution.

 

Une conception modulaire

C’’eesstt  sssûûûrreement aussi un peu cet esprit novateur qui l’anime qui a fini par orienter le choix de Fabrice vers le tracteur Felix. Débardant essentiellement pour des propriétaires privés des montagnes vosgiennes, il explique être souvent confronté à des accès compliqués, des pistes forestières étroites, mal entretenues, et parfois escarpées avec, dans la région, des sols durs et pierreux. Son impératif absolu était donc de contenir au maximum le gabarit de la nouvelle machine. Ceci excluait d’office toute option sur 6 roues. Par contre, la version dite « variable » du Felix 4 roues conjugue un certain nombre de qualités qui n’ont pas laissé l’entrepreneur indifférent. Pour la manœuvrabilité, le double système de direction propose un angle de braquage pouvant aller jusqu’à 70°. Un angle totalement inédit obtenu par la combinaison de l’essieu arrière directeur et de l’articulation centrale. En déplacement, le pilotage au volant n’a d’effet que sur l’articulation alors qu’au travail, avec les joysticks, il est possible de combiner les deux. Manuellement ou éventuellement avec une option de coordination automatique du braquage. Ensuite, la longueur variable du Felix permet de réduire son empâtement rapidement de 1,20 m. La poutre centrale du châssis arrière dispose en effet d’une extension hydraulique permettant d’allonger l’espace de chargement de 3.240 à 4.440 mm. Enfin, fort utile pour se stabiliser dans des contextes montagneux, un système de vérins compensateurs sur l’essieu arrière permet de maintenir la plateforme de chargement à l’horizontale lorsque le tracteur est en dévers. Pratique pour pouvoir toujours charger dans de bonnes conditions. La compensation peut, en option, se faire en mode automatique elle aussi, mais l’opérateur peut à tout moment reprendre la main sur le système pour adapter lui-même le centre de gravité de la machine en fonction de l’obstacle à franchir. Pour la motorisation, Pfanzelt propose deux options de puissance pour le moteur Deutz 6 cylindres, 6,1 l. : 180 ou 236 ch. Fabrice lui a préféré rester modeste en privilégiant le moins puissant. Un choix qui ne relève pas du hasard ni de l’économie. Mais plutôt de l’idée, qu’à configuration et équipement identiques, le moteur 180 ch forcerait moins sur la partie hydrostatique commune. Car la dernière génération du tracteur Felix dispose d’une nouvelle transmission à variation continue dont le principe repose sur deux moteurs et deux pompes hydrauliques. Chaque essieu bénéficie de son propre entraînement. Plus de boîte de vitesse, donc, et une traction favorisée par une transmission intégrale permanente. Sans parler de la possibilité de rouler à 40 km/h sur route avec un régime moteur réduit, même si la machine n’est malheureusement pas homologuée en France. 
Du côté de l’équipement, Fabrice qui débarde aussi bien des bois courts que longs, a posé quelques exigences particulières. Comme la position du treuil, un 2 x 10 t avec deux bobines de 100 m de câble en 15 mm de diamètre, lui aussi désormais entraîné hydrauliquement. Ordinairement placé sous le pied de grue, l’acquéreur vosgien l’a souhaité, lui, derrière la grue afin que la hauteur de cette dernière ne dépasse pas celle de la cabine. Les ingénieurs allemands l’ont donc positionné dans un caisson lui-même intégré dans la base de la grille, celle-ci étant fixe, solidaire des deux premiers ranchers. Juste derrière, la grue est un modèle  Rk 9185 à double télescope, qui propose une portée de 8,5 m et une puissance nette de 9 t/m. Enfin, le klemmbank de 0,7 m² ouvre jusqu’à 2.045 mm. Il est monté sur un dispositif coulissant qui propose deux points de fixation pour le positionner idéalement selon la nature des charges. Aux extrémités des deux pointes de la pince, on trouve deux emplacements prévus pour installer des poteaux supplémentaires à l’arrière et ainsi pouvoir disposer d’un panier pour charger des billons, jusqu’à 6 m de long. Encore un changement de configuration astucieux qui ne nécessite ni montage ni démontage d’éléments. La conception complètement modulaire du châssis arrière du Felix permet en effet un grand choix d’options. 

 

Agile et costaud dans la pente

Lee  FFeelliixx  dde Fbv Énergie Bois a été mis en route en juillet 2018, juste après avoir été exposé flambant neuf non loin de là au Haut-du-Tôt, lors du concours de débardage des Gueules de Bois. Depuis, Valentin, son pilote, a déjà effectué près de 2.000 h dans sa cabine et dispose donc d’une expérience intéressante sur divers types de chantier. En l’occurrence, Fabrice nous a conviés sur une superbe parcelle privée, avec un relief à faire pâlir les débardeurs de plaine. Un chantier mixte, où l’entreprise doit sortir aussi bien de l’épicéa scolyté que des chênes matures. Au total, environ 200 m3 de feuillus et  250 m3 de résineux, Fbv intervenant en prestation avec récupération du bois-énergie pour son compte. Ce matin-là, le Felix est paré pour le bois long. Valentin doit débarder des grumes du haut de la parcelle avec un long chemin de traîne à parcourir. La piste est étroite et comporte quelques passages extrêmement pentus. Le sol est dur, recouvert de pierres susceptibles tout de même d’ameublir l’assise de l’engin. Dans l’habitacle, Valentin est à l’aise. Il faut dire que la cabine mérite bien son qualificatif de Xxl. Il y a de l’espace, le confort n’est pas en reste et c’est tant mieux, car cela secoue quand même. Si Valentin n’a pas vraiment de critères de comparaison avec un débusqueur plus classique, le jeune pilote n’ayant conduit auparavant qu’une épareuse et une débroussailleuse radiocommandée, il n’en apprécie pas moins la suspension de cabine. Montée sur des amortisseurs pneumatiques, elle absorbe bien les vibrations. Le siège n’est pas en reste, et sa rotation électrique sur 350° permet à l’opérateur de se positionner au mieux.  Avec ses 2,55 m de large, le Felix passe partout. Dès que l’angle de la pente augmente, Valentin joue de l’articulation centrale ou des compensateurs pour franchir plus aisément l’obstacle. La cabine positionnée très en avant de l’essieu offre un angle d’attaque optimal au tracteur et la visibilité sur l’avant est très bonne. Ceci d’autant plus que la surface vitrée dépasse les 7 m² de surface. Du sol au plafond, puisque le toit est également bien ajouré, protégé par une grille. Arrivé vers les grumes à débarder, l’opérateur prend soin de bien caler la machine à l’arrêt avant d’entamer les opérations de grutage. Valentin commence par aller poser ses élingues sur trois troncs qu’il ramène contre le tablier à la radiocommande. Puis, il en place deux autres dans le klemmbank avant d’en saisir un sixième dans la pince de sa grue. C’est ainsi bien chargé qu’il entame lentement la redescente vers ce qui lui sert de place de dépôt. Valentin, en tous cas, ne se plaint pas de sa condition. Il apprécie son environnement de travail et explique que piloter un tracteur aussi spécifique, de surcroît pour une première expérience, est un facteur supplémentaire de motivation. Voire même d’une certaine fierté non déplacée. L’entretien régulier à apporter au Felix est somme toute assez classique, semblable à une autre machine d’exploitation, avec des accès aux éléments du moteur par basculement de la cabine ou par une trappe inférieure. Ce relatif confinement mécanique n’a-t-il pas pour corollaire d’entraîner une surchauffe ? Fabrice l’a craint un moment, lorsque pendant la canicule estivale les capteurs indiquaient une température anormalement élevée. Mais le réservoir d’huile n’étant pas si chaud au toucher, il a pris le parti de continuer le travail ce qui n’a pas provoqué non plus de dommages. Sinon, aucun souci majeur n’a été à déplorer et la proximité de Claas Est, le revendeur qui lui a fourni le Felix, se veut rassurante. Valentin, en tant qu’opérateur, n’aurait pas craché sur le moteur de 236 ch, pour disposer d’une réserve de puissance plus importante. S’il déplore parfois un comportement un peu poussif dans les passages les plus raides, il explique par ailleurs pouvoir passer à peu près partout… Quand le terrain est particulièrement gras, il chaîne les pneus arrière, le chaînage des quatre roues ne s’étant pas encore imposé. Quant à la consommation, suivant les chantiers elle se situe entre 40 et 60 l/j,  ce qui demeure très raisonnable. Bref, patron comme pilote semblent onvaincus par le système Pfanzelt. Qu’on se le dise, le Felix n’est pas qu’une curiosité forestière. Sa sophistication poussée n’en fait pas qu’un couteau suisse de luxe, mais bien un robuste tracteur forestier, agile et polyvalent.

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